Notre Unité Pastorale

Homélie pour la fête de la Sainte Famille

Frères et sœurs dans le Christ,

Dans le prolongement de Noël, nous est proposée la Sainte Famille, composée de Ma­rie, Joseph et l’enfant Jésus comme modèle de toute famille chrétienne. Nous sommes donc invités à recueillir ce témoignage en toute simplicité de cœur.

Mais ne soyons pas naïfs : à vue humaine, cette famille n’est pas ce que l’on pour­rait appeler une famille normale, classique. Pour Joseph, Jésus est un enfant a­dop­tif ; Marie est enceinte avant mariage... De plus, l’Evangile que nous venons de lire nous la présente comme une famille fragile, sans cesse en déplacement, en train de fuir les dangers. Rien de plus actuel au regard de tant de familles d’émi­grés fuyant leur pays en proie à la guerre, à la famine, à la précarité économique. Mais quel paradoxe : le Dieu que l’on appelle ‘Tout-Puissant’ ou le ‘Très-Haut’ de­vient extrêmement vulnérable en cet enfant nouveau-né dans des conditions si précaires. C’est donc le pari ‘fou’ du Dieu d’amour qui veut passer par des hom­mes pour accomplir son dessein salvateur.

L’évangéliste Matthieu s’empresse toujours de démontrer que ce plan de salut vou­lu par Dieu était déjà annoncé par les prophètes de l’AT, puisqu’il s’adressait aux Juifs qui connaissaient l’Ecriture. Mais pourquoi cette manie de Dieu de tou­jours choisir des gens anonymes, des pauvres et des faibles pour collaborer avec lui ?! N’est-ce pas parce que ce sont eux qui savent le mieux l’écouter et le sui­vre ? Marie a dit un oui total lors de la visite de l’ange à l’annonciation ; tandis que Joseph, lui, a entendu en songe le message divin à plusieurs reprises : lors­qu’il s’apprêtait à renvoyer en secret Marie enceinte, lorsqu’il fallut fuir en Egypte pour éviter la tuerie d’Hérode et enfin quand il put rentrer en Israël et retourner à Nazareth ; c’est aussi pourquoi on appellera le Christ ‘Jésus de Nazareth’ ou ‘le Na­zaréen’. À chaque fois, cet homme juste a reconnu la voix de Dieu et s’y est conformé. Cette fuite en Egypte est un peu la réplique du parcours de Joseph, fils de Jacob, qui a autrefois sauvé le peuple de la famine.

Mais regardons d’un peu plus près pourquoi l’Eglise veut nous donner cette fa­mille si ‘particulière’ en exemple. Soulignons encore une fois le fait qu’elle a dû se battre pour survivre. Joseph et Marie ont dû se demander plusieurs fois pourquoi Dieu les faisait ainsi suer sang et eau pour sauver l’enfant Jésus, son Fils bien-ai­mé. Cela ne nous fait-il pas comprendre que vivre vraiment sa foi chrétienne de­man­de courage et persévérance ? Non, la vie chrétienne n’est pas un long fleuve tranquille. Je pense qu’il n’y a jamais eu autant de persécutions de chrétiens dans le monde que ces derniers temps, en particulier en Orient et dans certains pays d’Afrique à majorité musulmane. Et même dans des pays dits chrétiens, des per­sonnes engagées, laïques ou religieuses, sont assassinées parce qu’elles déran­gent ceux qui ont le pouvoir ! Mais sans aller si loin, regardons notre propre vie : parfois l’appel de Dieu exige de modifier nos plans de fond en comble. Cela nous demande de prendre au sérieux la parole du Notre Père : « Que ta volonté soit faite… ». Oui, sa volonté demande de nous dépasser dans un amour et une cha­rité désinté­ressée.

La lecture, de son côté, nous a présenté les générations qui forment la famille. Il est vrai qu’à une certaine époque, 3 voire 4 générations vivaient sous le même toit. Aujourd’hui nous assistons au morcelle­ment de la famille au sens large : chaque génération vit de son côté. Par ailleurs, que de divorces, de familles mo­noparentales ou recom­posées ! Il faut reconnaître que cela n’aide guère au bon épanouis­se­ment des enfants. Dans les pays du Sud défavorisés, la mauvaise situa­tion pousse même des parents à ‘vendre’ les enfants qu’ils ne peuvent nourrir, avec pour conséquences : la prostitution de mineurs, les enfants esclaves ou sol­dats ; ce qui ne correspond vraiment pas au plan de Dieu !

Dans sa lettre, l’apôtre Paul utilise un terme qui n’est plus du tout à la mode au­jourd’hui, c’est celui de ‘soumission’. Et pourtant, il est vrai que Jésus, jusqu’à sa vie publique, fut soumis à ses parents. Marie et Joseph se sont soumis au plan de Dieu et ils se sont soumis l’un à l’autre dans la fidélité et l’amour. N’est-ce pas là la clé du bonheur selon le plan de Dieu : une soumission librement consentie, parce que vécue dans l’amour.

Alors demandons au Seigneur le courage et la force de toujours mieux accomplir sa volonté. Bienheureux serons-nous, si nous allons jusqu’au bout des exigences de l’Amour. AMEN.