Frères et sœurs dans le Christ,
Si l’évènement de la naissance de notre Sauveur à la crèche s’est passé de manière humble et discrète, la fête de l’Epiphanie, elle, est une fête d’ouverture au monde. Elle est éminemment missionnaire. En effet, St Matthieu veut faire comprendre à ses contemporains juifs que le salut de Dieu, à travers son Messie, est destiné au monde entier. Et St Paul, dans le passage de sa lettre aux Ephésiens, ne fait que renforcer cette conviction : « Toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps (…) par l’annonce de l’Evangile ! », souligne-t-il.
Mais, si vous le voulez bien, suivons l’épopée des Mages étape par étape. D’abord, ils ont reconnu un signe dans ciel : l’étoile qui les a guidés sur la route menant à Jérusalem. S’ils n’avaient pas été des gens en recherche de l’au-delà, ils n’auraient certes pas prêté attention à ce signe et ils ne se seraient pas mis en route vers l’inconnu, comme jadis Abraham. – Donc, 1ère leçon à tirer, si j’ose dire : savons-nous, nous aussi, reconnaître les signes que Dieu nous donne dans les moments importants de notre vie ?
Les Mages vont tout naturellement s’adresser au roi Hérode et à sa suite siégeant à Jérusalem, puisque ce signe est celui de l’apparition d’un nouveau roi. Là, surprise : Il est écrit, en effet, que « Hérode fut bouleversé et tout Jérusalem avec lui ». On attendrait une explosion de joie et voilà des chefs politiques et religieux qui s’inquiètent pour leur position et leur pouvoir. Pire encore, les lettrés retrouvent le passage du prophète Michée qui parle de Bethléem comme lieu de naissance du Messie-Sauveur ; mais alors, pourquoi ne sont-ils pas eux aussi allé l’adorer ?! On est donc bien loin du « Debout ! Jérusalem » de la 1ère lecture. – Nouvel enseignement pour nous : si les descendants du peuple élu – à part un tout petit cercle de croyants – n’étaient pas du tout prêts à recevoir le Messie à la manière du plan de Dieu, cela montre que parfois, là où l’Eglise est bien implantée et sans persécution, la foi a tendance à s’endormir. Rien de pire que la routine prenant le dessus, car alors, l’élan missionnaire se tarit et le témoignage s’éteint.
Mais les Mages, eux, poursuivent leur route jusqu’à la crèche, remplis de joie, car l’étoile les a guidés à nouveau. Ce lieu, bien misérable pour un futur roi, ne semble pas étonner ni déranger ces hommes de foi qui se prosternent et offrent leurs cadeaux ! - J’y vois là un message quelque peu dérangeant, aussi pour nous aujourd’hui, dans la mesure où l’appel de Dieu nous sort parfois de nos habitudes et de notre train-train habituel. Le pape François parle, lui, de ne pas « se laisser anesthésier le cœur » ! Oui, bien souvent, le Christ nous apparaît là où nous ne l’attendions pas et le plus souvent parmi les pauvres, comme lui-même le fut lors de sa naissance. Bien souvent, ce sont des évènements douloureux qui nous rapprochent de lui.
Et les cadeaux offerts par les Mages représentent également tout un symbole sur ce que sera cet enfant nouveau-né : l’or pour un roi (mais son royaume n’est pas de ce monde), l’encens pour le Messie, parole définitive de Dieu ; la myrrhe pour embaumer le corps du crucifié… - Et pour nous, la question : qu’avons-nous à offrir au Seigneur ? N’est-ce pas d’abord notre vie elle-même : « Qui perd sa vie pour moi la sauvera ! » nous dira Jésus.
Enfin, il est écrit qu’avertis en songe, les Mages sont retournés chez eux par un autre chemin, ce qui a d’ailleurs mis Hérode dans une rage meurtrière comme nous le savons. - Nous pouvons dire que nous aussi avons suivi le chemin des Mages. Depuis notre baptême, ne sommes-nous pas toutes et tous en chemin, avec des îlots de lumière et parfois aussi des carrefours dans la pénombre ?
Dernier élément à méditer : encore une fois, l’Epiphanie nous rappelle que la mission de l’Enfant-Dieu vaut pour le monde entier. St Paul le dit bien dans sa lettre : « Juifs et païens ont reçu le même héritage. ». En ce XXIe siècle, le christianisme s’est effectivement répandu dans le monde entier, mais demeure très minoritaire dans nombre de pays. D’ailleurs, seul un tiers de l’humanité se déclare chrétienne. Chaque jour, des nouvelles alarmantes et douloureuses nous parviennent de bien des endroits. Tandis que la vieille terre d’Europe retourne tout doucement au paganisme et doit intégrer d’autres religions ; c’est en Afrique et en Amérique latine que se concentre aujourd’hui la majorité catholique qui ose s’affirmer comme telle.
Dans ce sens, l’Epiphanie nous invite à relever un grand défi ! Elle nous veut accueillants et ouverts aux autres, aux étrangers, à ceux et celles qui viennent d’autres horizons.
Alors, demandons au Seigneur qu’en cette fête de l’Epiphanie, il nous transforme de l’intérieur et intensifie la présence du Sauveur dans nos cœurs, comme aussi autour de nous. Amen.